9
Octobre s’acheva avec un vent du nord incessant et un ciel gris perle. Le jour des calendes de novembre fut froid et blafard, entrecoupé de rapides averses de pluie qui n’allaient jamais jusqu’à la bourrasque, mais semblaient tomber du ciel d’un coup, comme des larmes, avec cette parcimonie propre aux dieux, lorsqu’ils daignent pleurer. Cela continua jusqu’au huitième jour de novembre, dont la lumière ne fut jamais plus forte que celle de l’aube. Une masse de nuages noirs s’amoncelait au nord ; de grandes rafales de vent parcouraient la vallée. Les animaux furent regroupés dans l’étable. La voie Cassienne était déserte, à l’exception de quelques rares troupes d’esclaves en déplacement, conduites par des hommes à cheval.
Mis à part quelques sorties pour vérifier périodiquement que les portes restaient bien fermées et que tout le matériel était soigneusement rangé, tout le monde resta à la maison. Bethesda passait son temps à consoler Diane que chaque coup de tonnerre terrorisait, mais se montrait d’une humeur de dogue avec tous les autres membres de la maisonnée. Meto s’était enfermé dans sa petite chambre, où je le découvris, un jour, entouré d’un rouleau de Thucydide et de ses petits soldats de métal disposés en ordre de bataille sur le sol. Comme je lui demandais en souriant quelle bataille il reconstituait ainsi, il parut gêné, puis agacé, et repoussa ses soldats.
La dernière bonne chose que l’on pût attendre de cette épouvantable journée était une bonne pluie, pensai-je. De temps en temps, j’allais dans le petit jardin pour surveiller le ciel. Le mont Argentum était enveloppé dans un épais manteau de nuages noirs, zébré à intervalles réguliers de lueurs d’éclairs. Il devait pleuvoir épouvantablement sur les hauteurs de la montagne, mais la vallée ne connaissait que le vent et les ténèbres. La pluie commença finalement après le coucher du soleil. Cela débuta par un doux murmure sur les tuiles des toits, mais tourna bien vite au torrent d’eau. Nous découvrîmes alors quelques nouvelles fuites dans la toiture ; Bethesda, avec l’autorité retrouvée d’un général qui a rongé son frein, loin de la bataille, fit apporter de la cuisine des pots et des marmites pour recueillir l’eau. Diane retrouva soudain toute sa gaieté, ouvrit une fenêtre et, protégée par un volet, regarda avec délice la pluie tomber. Même Meto parut de meilleure humeur ; il vint reporter le manuscrit de Thucydide dans mon cabinet de travail et nous parlâmes un moment, tranquillement, des Spartiates et des Perses. Je rendais silencieusement grâce aux dieux de cette rémission.
Ayant été enfermés toute la journée à ne rien faire, nous fûmes bien éveillés ce soir-là et, après le souper, je demandai à Meto de nous faire un peu de lecture à voix haute : Hérodote, avec ses récits de terres et de coutumes étranges, me parut un bon choix. Les heures passèrent, mais personne ne semblait vouloir aller au lit. La pluie continuait de tomber à seaux. J’avais disposé un guetteur, comme chaque nuit, mais comme il ne pouvait se tenir sur le toit de l’écurie, en raison du temps, il s’était mis dans le grenier d’où il pouvait faire son devoir, depuis une petite fenêtre protégée par des volets. Lorsque les hommes arrivèrent de la voie Cassienne, il les vit donc parfaitement.
Personne ne l’entendit d’abord frapper à la porte de la maison, avec le martèlement de la pluie. Nous ne nous aperçûmes du bruit que lorsque le guetteur commença de crier et de frapper en agitant la serrure. Bethesda se mit aussitôt en alerte : quelques expériences pénibles, à Rome, l’avaient rendue très méfiante face aux visiteurs nocturnes. Son inquiétude se communiqua aussitôt à sa fille, qui s’agita sur ses genoux. Meto rangea le rouleau qu’il nous lisait et vint avec moi dans l’atrium. J’ouvris le judas et regardai. L’esclave criait en indiquant frénétiquement du doigt la direction de la route ; nous enlevâmes les barres de la porte et il se précipita à l’intérieur, ruisselant d’eau.
— Des hommes ! dit-il d’une voix rauque. Venant de la grande route ! Toute une armée à cheval !
Il exagérait : trente hommes ne font pas une armée, mais ils offrent quand même une perspective très inquiétante, lorsqu’on les voit galoper dans l’obscurité, enveloppés de manteaux sombres. Ils étaient à moins de cent pieds.
— Catilina ? cria Meto, dans la bourrasque de pluie.
— Je ne saurais le dire, répondis-je.
— Papa, ne devrions-nous pas barrer la porte ?
J’approuvai et bloquai la porte avec les barres. La protection était toute relative : la porte pouvait résister à des voleurs ou des brigands mal équipés, mais pas à une troupe bien année. De plus, les entrées de la bibliothèque et de la cuisine étaient plus faciles encore à forcer. Des coups violents ébranlèrent soudain la porte, si forts que je reculai un instant. Puis je risquai de nouveau un œil par le judas grillagé.
— Catilina ? murmura Meto.
— Je ne crois pas, répondis-je.
Je distinguais mal les visages au-dehors, en raison de l’obscurité et des manteaux qui enveloppaient les cavaliers.
— Des esclaves échappés ? reprit Meto.
En me retournant, je vis la peur dans ses yeux. Je mis ma main sur son épaule et le serrai contre moi. Les coups, manifestement frappés avec un objet contondant qui devait être le pommeau d’une épée, recommencèrent. Je criai par le judas :
— Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ?
L’un des hommes, qui était resté à cheval – le chef, supposai-je –, fit signe à celui qui frappait à la porte d’arrêter.
— Nous voulons l’homme que vous cachez ici ! cria-t-il.
— Quel homme ? Qui voulez-vous ? répondis-je, un peu réconforté.
Tout cela devait être une bizarre méprise. Mais je dus déchanter aussitôt.
— Catilina ! Amenez-le-nous !
— Catilina n’est pas ici ! criai-je.
— Catilina est ici !
— Papa, qu’est-ce qu’il raconte ?
— Je ne sais pas.
Je regardai Bethesda, non loin de là, dans l’atrium, figée comme une statue, Diane serrée contre elle. Je remis ma bouche à l’ouverture.
— Qui vous envoie ?
Pour toute réponse, le martèlement redoubla. L’instant d’après, j’entendis un fracas de bois brisé venant de l’intérieur de la maison. Je me retournai et vis Bethesda regarder avec terreur en direction de la bibliothèque, puis hurler. Les hommes étaient dans la maison. Je courus auprès de Bethesda et de Diane, Meto sur mes talons. Aratus apparut, le visage paniqué. Un nouveau craquement, cette fois du côté de la cuisine, et ce fut le tour de Congrio de gagner l’atrium, hurlant d’effroi. Un violent éclair illumina soudain la maison, très rapidement suivi d’un brutal coup de tonnerre qui roula longuement, comme une gigantesque meule. Par-dessus les échos du tonnerre et le martèlement de la pluie, je percevais le fracas des tables renversées, des rideaux déchirés et de la vaisselle brisée. Les hommes armés fouillaient brutalement la maison et affluaient de tous côtés dans l’atrium, de longues épées à la main. Certains allèrent déverrouiller la porte dont ils maintinrent les battants ouverts.
Leur chef sauta à bas de son cheval. Il tira son épée et pénétra dans la maison ; il était si grand qu’il dut se courber pour franchir le seuil. Il arriva dans l’atrium.
— Gordien ? demanda-t-il en haussant la voix pour se faire entendre dans ce vacarme.
Je me redressai de toute ma hauteur, en attirant Bethesda plus près de moi ; Meto vint se placer à mon côté.
— Je suis Gordien, dis-je. Qui es-tu et que veux-tu ?
— Nous voulons le renard sauvage que nous avons traqué jusqu’ici ! Où est-il ? dit-il dans un grognement de rage.
— Si tu parles de Catilina, il n’est pas ici, dit Meto, d’une voix légèrement cassée.
— Ne me mens pas, petit !
— Je ne suis pas petit !
L’homme rit, d’un rire qui me glaça le sang : c’était le rire cruel et triomphant du chasseur qui est sur le point de sonner l’hallali. Quelques hommes avaient ôté leur manteau et leurs visages me paraissaient vaguement familiers…
— Les gardes du corps de Cicéron, murmura soudain Meto à mon oreille. Tu sais, le jour de ma toge virile…
— Que chuchotes-tu ? aboya l’homme, l’épée menaçante. Où l’avez-vous caché ?
— Catilina n’est pas ici, dis-je.
— Impossible ! Nous savons que cet endroit est son refuge. Nous l’avons suivi d’une traite, depuis Rome. Ce fou pensait pouvoir nous échapper. Mais nous sommes là pour le ramener, d’une façon ou d’une autre !
— Il n’est pas ici. Pas dans la maison, en tout cas. Peut-être dans l’écurie ?
— Nous avons déjà cherché ! Livre-le-nous maintenant !
L’un de ses compagnons vint lui dire quelque chose à l’oreille.
— Impossible ! cria-t-il. Ils le cachent quelque part.
— Mais il y avait au moins neuf hommes avec lui, dit l’autre d’une voix un peu hésitante. On ne peut pas dissimuler dix hommes et dix chevaux dans une maison comme celle-ci…
— Dix hommes et neuf chevaux, corrigea le chef. Tu as oublié celui que nous avons trouvé sans cavalier, sur la route.
Puis il se tourna vers moi, l’air soudain accablé.
— Nous lui avons donné la chasse pendant quatre heures. Il avait une bonne avance, au départ, mais nous avons vite été sur ses talons, même si la nuit était noire comme de la poix et mouillée comme un lac. Il y a eu, tout à l’heure, une déchirure dans les nuages et nous avons pu les apercevoir devant nous, juste comme ils passaient l’ensellement entre la montagne et la colline, non loin d’ici. Puis les ténèbres les ont de nouveau engloutis – à l’exception d’un cheval que nous avons trouvé sur la route, sans cavalier. Est-ce la monture de Catilina ? Est-ce la raison pour laquelle ils se sont arrêtés ici, se croyant en sécurité ? Où est-il ? Livre-le-nous !
L’homme criait toujours, mais le ton de désespoir dans sa voix me rendit ma confiance. Ce n’était plus le chasseur sur le point d’égorger sa proie ; c’était un poursuivant berné, à qui le gibier avait échappé. Il était furieux, mais pitoyable. J’essayai de profiter de ce moment de faiblesse et de fatigue.
— Catilina ne s’est pas arrêté ici cette nuit, dis-je. Crois-tu que je ne te le dirais pas, s’il l’avait fait ? N’ai-je pas été aussi loyal que toi envers le consul ? Si tu connais mon nom et si tu sais que Catilina a trouvé refuge ici par le passé, tu dois également savoir le rôle que j’ai joué pour Cicéron, non ? Que pensera-t-il lorsqu’il apprendra le saccage de ma maison, la peur infligée à ma famille ? Catilina n’est pas ici, je te le répète ! Nous ne l’avons pas vu depuis de longs jours. Il vous a échappé, voilà tout. Si vous souhaitez encore le coincer, vous feriez mieux de repartir au plus vite sur la voie Cassienne.
L’homme tremblait – de rage ? – mais je m’aperçus que, en fait, il grelottait de froid. Il se passa la main dans les cheveux, découvrant son visage soigneusement rasé ; malgré sa stature, il était très jeune. Le tumulte s’apaisait graduellement dans la maison ; les gardes du corps se regroupaient progressivement dans l’atrium, attendant les ordres. Leur chef me regarda sombrement.
— Les sbires de Catilina ont essayé d’assassiner le consul, hier matin. Ils sont venus à l’aube chez lui, sous couvert de demander de l’aide pour une démarche officielle, pensant qu’ils pourraient abuser les esclaves et pénétrer dans la maison. Mais le consul était sur ses gardes et ne les a pas laissés entrer.
« Aujourd’hui. Cicéron a rassemblé le Sénat dans le temple de Jupiter et il a exposé en détail tous les crimes de Catilina contre la République – un discours si violent qu’il ébranlait le temple même, a-t-on dit ! Catilina se tenait dans un coin, entouré de ses partisans, mais conspué par tous les autres sénateurs dans un grand élan de patriotisme. Chaque fois qu’il a essayé de prendre la parole, les sénateurs l’ont fait taire par leurs cris. Il a compris alors le destin qui l’attendait et, ce soir, le lièvre a quitté sa tanière.
— Tu as dit que c’était un renard, tout à l’heure, grommela Meto avec un aplomb que je ne lui connaissais pas.
Je respirai un grand coup et le retins.
— Vraiment ? dit le chef des gardes du corps. Bah, peu importe ! On l’écorchera bientôt et une belle peau de lièvre vaut une belle peau de renard.
Puis il se tourna vers son compagnon.
— Vous avez fouillé tous les bâtiments ? Même les enclos à bétail ?
— Aucune trace d’eux, pas même des empreintes fraîches dans la boue.
L’homme remit le capuchon de son manteau sur son visage et fit signe aux autres de remonter promptement à cheval. Il s’enveloppa de son manteau, puis me regarda avec gravité.
— Si Catilina devait revenir, ne lui donne plus l’asile et le couvert. Le temps des faux-semblants est passé. Catilina est un homme mort, comme le sont aussi tous ses partisans. Personne n’aurait pu le dire plus éloquemment que Cicéron ne l’a fait aujourd’hui devant le Sénat, en présence même de Catilina : « Le temps du châtiment est venu. Morts ou vifs, nous les porterons en holocauste sur l’autel des dieux, en sacrifice perpétuel ! »
— Non, non et non ! dit Bethesda. Aucun de vous deux ne sort à présent ! Êtes-vous devenus fous ?
Une fois certains que les hommes en armes étaient repartis vers le nord, sur la voie Cassienne, Meto et moi avions commencé à nous préparer pour sortir. Nous étions arrivés à la même conclusion, sans avoir à prononcer une seule parole. C’était bon de me retrouver en communion avec mon fils ; cette harmonie m’aida beaucoup à atténuer le choc des émotions subies auparavant. Mais Bethesda ne voulait rien savoir.
— Ôte-moi cette lourde tunique, époux ! Et toi, Meto, enlève ce manteau ! Où voulez-vous donc aller ?
— Si Catilina et ses hommes ont été vus dans l’ensellement entre la montagne et la colline… commença Meto, sans se soucier de la présence et des vociférations de Bethesda.
— Puis s’ils ont disparu soudainement… relayai-je.
— Et qu’un de leurs chevaux ait été retrouvé sans cavalier…
— C’est qu’ils ont dû trouver refuge quelque part en dehors de la route !
— Cet espace derrière le gros rocher, est-il assez vaste pour abriter neuf chevaux ? demanda Meto.
— Je pense que oui. Mais nous le saurons assez vite.
— Tu ne vas pas lui proposer de venir avec toi, objecta Bethesda, fermement. Que se passera-t-il si les autres abandonnent la poursuite et reviennent sur leurs pas ? S’ils revenaient et qu’ils le trouvent ici – tu as entendu ce que leur chef disait : « Ne lui donne plus l’asile ni le couvert ! » Pense à ta femme et à ta fille !
— De la nourriture ! dit Meto. Nous allions l’oublier. Que pouvons-nous leur apporter ?
— Je l’interdis ! s’écria Bethesda.
— Femme, dis-je, songe au beau Catilina et au ravissant Tongilius. Voudrais-tu les voir réduits à l’état de squelettes blanchis, faute de quelques restes de la cuisine de Congrio ?
Cette facétie – quoique un peu déplacée de ma part – eut la bonne fortune d’adoucir Bethesda.
— Nous avons du pain, cuit de ce matin. Et des pommes en quantité…
— Je vais les chercher, dit Meto.
— Ces hommes doivent avoir froid et être trempés, reprit Bethesda. Une ou deux couvertures sèches…
— Il y a des couvertures sur notre lit, fis-je observer.
— Non, pas celles-ci ! Nous en avons d’autres, un peu usées ; je vais les chercher moi-même.
Et c’est ainsi que Bethesda nous aida pour secourir Catilina et les siens.
Nous évitâmes la route qui menait à la voie Cassienne pour couper à travers champs et vergers. Le terrain était fangeux et glissant, mais nous atteignîmes la voie Cassienne sans encombres. Contre toute attente, nous n’eûmes guère de mal à retrouver le départ de l’ancienne piste de la mine, malgré l’obscurité et la pluie, comme si la main de quelque dieu nous avait guidés. Nous mîmes pied à terre pour nous glisser entre le vieux chêne et le gros rocher, non sans peine, car j’étais chargé d’un rouleau de couvertures et Meto d’un sac de pommes et de pain. Nous tirâmes nos chevaux derrière nous et découvrîmes bientôt, comme nous l’avions escompté, la petite clairière remplie de chevaux attachés à des troncs, des rochers ou des branches. A la faveur d’un éclair, je les comptai : ils étaient neuf.
La clairière était devenue un véritable marécage et la raison en était simple : l’ancien chemin qui menait à la mine s’était transformé en torrent.
— Impossible de monter ! dis-je, atterré.
— Mais Catilina et ses hommes l’ont bien fait, rétorqua Meto.
— Nous sommes alourdis par ces provisions et ces couvertures…
— Viens, papa, ce n’est pas si dur qu’il y paraît, dit Meto en prenant résolument les devants.
Il n’y avait pas d’autre solution que de le suivre. Mais la montée, déjà pénible en temps normal, se révéla vite périlleuse ; et comment redescendrions-nous ? Meto marchait devant moi, agile comme une chèvre malgré la boue et les cailloux glissants. Nous arrivâmes assez vite au point de jonction avec le chemin qui montait de la ferme de Gnaeus Claudius.
— La question est maintenant de savoir si Catilina est allé à droite ou à gauche, dis-je.
— A droite, bien sûr, vers la mine, trancha Meto.
— Tu crois ? Pourtant, un lien secret entre Gnaeus et Catilina expliquerait bien des choses ; le meurtre de Forfex, par exemple…
— Comment pourrait-il y avoir un lien ?
— Je ne sais pas ; j’ai trop froid et je suis trop mouillé et trop fatigué pour réfléchir à cela. Mais pourquoi Catilina n’aurait-il pas gagné incognito la maison de Gnaeus ?
Nous suivîmes un instant le chemin qui y menait, mais je dus vite reconnaître mon erreur : aucune trace de pas n’était visible sur le sentier. Quand nous eûmes repris la montée vers la mine, nous trouvâmes aussitôt les empreintes. Gravir l’escalier, près de la cascade, fut des plus pénibles, mais une surprise autrement plus grave nous attendait en haut : le torrent avait considérablement grossi et sa traversée, à deux pas du précipice de la cascade, était vraiment périlleuse.
Dans quelle aventure nous étions-nous engagés, sur un coup de tête ? Mais il fallait aller jusqu’au bout, même si je ne devais rien à Catilina : les gardes du corps de Cicéron étaient allés trop loin.
— Prends ma main, Meto. Nous serons plus forts contre le courant en traversant ensemble.
Après un instant d’hésitation, nous accrochâmes solidement nos poignets et nos mains, et avançâmes dans l’eau froide. Au prix de violents efforts, nous réussîmes à gagner l’autre rive. Comme nous abordions la longue montée finale, je me rendis compte que la pluie avait fortement diminué d’intensité et que nos pas alourdis par la fatigue faisaient crisser les cailloux du chemin. En approchant de la mine, je murmurai à Meto de faire moins de bruit en marchant. Mais il était trop tard : un javelot volait déjà à notre rencontre.